Chemin de croix au sanctuaire de Lourdes
6 Lorsqu'ils le virent, les grands prêtres et les gardes vociférèrent, disant: «Crucifie-le! Crucifie-le!» Pilate leur dit: «Prenez-le, vous, et crucifiez-le; car moi, je ne trouve pas en lui de motif de condamnation.» 7 Les Juifs lui répliquèrent: «Nous avons une Loi et d'après cette Loi il doit mourir, parce qu'il s'est fait Fils de Dieu.» 12 Dès lors Pilate cherchait à le relâcher. Mais les Juifs vociféraient, disant: «Si tu le relâches, tu n'es pas ami de César: quiconque se fait roi, s'oppose à César.» 16 Alors il le leur livra pour être crucifié.
De l'Evangile selon saint Jean 19, 6 - 7. 12. 16
MÉDITATION
Pourquoi Jésus fut-il condamné à mort, lui qui « là où il passait, faisait le bien » (Ac 10, 38) ? Cette question nous accompagnera au long de ce Chemin de Croix comme elle nous accompagne tout au long de la vie.
Dans les Évangiles, nous trouvons une réponse authentique : les chefs des Juifs ont voulu sa mort parce qu’ils ont compris que Jésus se considérait comme le Fils de Dieu. Et nous trouvons aussi une réponse dont les juifs ont usé comme d’un prétexte, pour obtenir de Pilate sa condamnation : Jésus aurait prétendu être un roi de ce monde, le roi des juifs.
Mais au-delà de cette réponse, s’ouvre un abîme sur lequel les Évangiles mêmes et toute l’Écriture Sainte nous font ouvrir les yeux : Jésus est mort pour nos péchés. Et plus profondément encore, il est mort pour nous, il est mort parce que Dieu nous aime et nous aime au point de donner son Fils unique, afin que nous ayons par lui la vie (cf. Jn 3, 16-17).
C’est donc vers nous qu’il faut regarder : vers le mal et le péché qui habitent en nous et que trop souvent nous feignons d’ignorer. Mais plus encore, nous devons tourner le regard vers Dieu riche en miséricorde qui nous a appelés ses amis (cf. Jn 15, 15). Ainsi, le Chemin de Croix et tout le chemin de la vie devient un itinéraire de pénitence, de douleur et de conversion, mais aussi de gratitude, de foi et de joie.
27Alors les soldats du gouverneur prirent Jésus avec eux dans le prétoire, et ils assemblèrent autour de lui toute la cohorte. 28 L'ayant dévêtu, ils jetèrent sur lui un manteau écarlate. 29 Ils tressèrent une couronne avec des épines, qu'ils posèrent sur sa tête, avec un roseau dans sa main droite; et, fléchissant le genou devant lui, ils lui disaient par dérision: " Salut, roi des Juifs! " 30 Ils lui crachaient aussi dessus et, prenant le roseau, ils en frappaient sa tête. 31 Après s'être moqués de lui, ils lui retirèrent le manteau, lui remirent ses vêtements et l'emmenèrent pour le crucifier.
(Evangile selon saint Matthieu 27, 27 - 31)
17 Et il sortit, portant sa croix, et vint au lieu dit du Crâne - ce qui se dit en hébreu Golgotha
De l'Evangile selon saint Jean 19, 17)
MÉDITATION
Après la condamnation, vient l’humiliation. Ce que les soldats font à Jésus nous semble inhumain. De fait, c’est sans aucun doute inhumain : ce sont des actes de dérision et de mépris à travers lesquels s’exprime une obscure férocité, indifférente à la souffrance, y compris physique, qui est infligée sans motif à une personne déjà condamnée au supplice effrayant de la croix. Cependant, ce comportement des soldats est également, malheureusement, très humain. Mille pages de l’histoire de l’humanité et de la chronique quotidienne confirment que des actions de ce genre ne sont vraiment pas étrangères à l’homme. L’Apôtre Paul a bien mis en lumière ce paradoxe : « Je sais… qu’en moi, … dans l’être de chair que je suis, n’habite pas le bien : … je ne réalise pas le bien que je voudrais, mais je fais le mal que je ne voudrais pas » (Rm 7, 18-19).
Il en est véritablement ainsi : dans notre conscience, la lumière du bien est allumée, une lumière qui, dans bien des cas, devient évidente et par laquelle, heureusement, nous nous laissons guider dans nos choix. Mais il arrive souvent le contraire : cette lumière est obscurcie par les ressentiments, par les désirs inavoués, par la perversion du cœur. Et alors, nous devenons cruels, capables des choses les pires, y compris de choses inimaginables.
Seigneur Jésus, moi aussi, je suis au nombre de ceux qui se sont moqués de toi et qui t’ont frappé. Tu l’as dit : « Chaque fois que vous l’avez fait à l’un de ces petits qui sont mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait » (Mt 25, 40). Seigneur Jésus, pardonne-moi.
4] Cependant, ce sont nos souffrances qu'il a portées, C'est de nos douleurs qu'il s'est chargé; Et nous l'avons considéré comme puni, Frappé de Dieu, et humilié. [5] Mais il était blessé pour nos péchés, Brisé pour nos iniquités; Le châtiment qui nous donne la paix est tombé sur lui, Et c'est par ses meurtrissures que nous sommes guéris. [6] Nous étions tous errants comme des brebis, Chacun suivait sa propre voie; Et l'Éternel a fait retomber sur lui l'iniquité de nous tous.
(Esaïe 53, 4-6)
MÉDITATION
Les Évangiles ne nous parlent pas des chutes de Jésus sous le poids de la Croix, mais cette antique tradition est infiniment vraisemblable. Rappelons seulement que, avant d’être chargé de la croix, Jésus avait été fait flageller par Pilate. Après tout ce qu’il avait subi depuis la nuit passée dans le jardin des oliviers, ses forces devaient être pratiquement épuisées.
Avant de nous arrêter sur les aspects les plus profonds et les plus spirituels de la Passion de Jésus, prenons simplement acte de la douleur physique qu’il a dû endurer. Une douleur immense et effrayante, et cela jusqu’à son dernier souffle sur la Croix, une douleur qui ne peut pas ne pas faire peur.
La souffrance physique est la plus facile à surmonter, ou tout au moins à atténuer, avec les techniques et les méthodes dont nous disposons aujourd’hui, avec les anesthésiants et autres prises en charge de la douleur. Et ceci, même si pour de multiples causes, naturelles ou liées aux comportements humains, un poids immense de souffrances physiques demeure présent dans le monde.
En tous les cas, Jésus n’a pas refusé la douleur physique et il s’est ainsi rendu solidaire de toute la famille humaine, particulièrement de ceux qui, en son sein, sont encore aujourd’hui marqués par ce type de souffrance. Alors que nous le voyons tomber sous la croix, nous lui demandons humblement le courage d’élargir les espaces trop étroits de notre cœur par une solidarité qui ne soit pas faite que de paroles.
Près de la croix de Jésus se tenaient sa mère et la soeur de sa mère, Marie, femme de Clopas, et Marie-Madeleine. 26 Jésus ayant vu sa mère, et auprès d'elle le disciple qu'il aimait, dit à sa mère: "Femme, voilà votre fils." 27 Ensuite il dit au disciple: "Voilà votre mère." Et depuis cette heure-là, le disciple la prit chez lui.
(Evangile selon saint Jean 19, 25 - 27)
MÉDITATION
Dans les Évangiles, on ne parle pas directement d’une rencontre de Jésus avec sa Mère sur le chemin de la croix, mais de la présence de Marie au pied de la Croix. Là, Jésus s’adresse à elle et au disciple bien-aimé, l’évangéliste Jean. Ses paroles ont un sens immédiat : confier Marie à Jean, afin qu’il prenne soin d’elle. Et en un sens beaucoup plus profond et plus large : au pied de la Croix, Marie est appelée à dire un second « oui », après le « oui » de l’Annonciation, par lequel elle est devenue la Mère de Jésus, ouvrant ainsi la porte à notre salut.
Par ce second « oui », Marie devient la mère de nous tous, de chaque homme et de chaque femme pour lesquels Jésus a versé son sang. Une maternité qui est le signe vivant de l’amour et de la miséricorde de Dieu pour nous. C’est pourquoi, les liens d’affection et de confiance qui unissent le peuple de Dieu à Marie sont si profonds et si solides ; c’est pourquoi nous recourrons spontanément à elle, surtout dans les circonstances les plus difficiles de la vie.
Marie, néanmoins, a payé cher cette maternité universelle. Comme Syméon l’avait prophétisé à son propos : « Toi-même, ton cœur sera transpercé par une épée » (Lc 2, 35).
Marie, Mère de Jésus et notre mère, aide-nous à faire l’expérience en nos cœurs, ce soir et toujours, de cette souffrance pleine d’amour qui t’a unie à la croix de ton Fils.
Comme ils l'emmenaient, ils saisirent un certain Simon de Cyrène, qui revenait de la campagne, et ils le chargèrent de la croix, pour qu'il la portât derrière Jésus.
(Evangile selon saint Luc 23, 26)
MÉDITATION
Jésus devait être vraiment épuisé et les soldats y remédient en saisissant le premier malheureux qu’ils rencontrent et en le chargeant de la croix. Dans la vie de chaque jour aussi, la croix, sous une multiplicité de formes – depuis une maladie ou un grave accident jusqu’à la perte d’une personne chère ou d’un travail –, s’abat souvent à l’improviste sur nous. Et nous ne voyons en cela qu’une malchance, ou pire encore, un malheur.
Mais Jésus a dit à ses disciples : « Si quelqu’un veut marcher derrière moi, qu’il renonce à lui-même, qu’il prenne sa croix et qu’il me suive » (Mt 16, 24). Ce ne sont pas des paroles faciles ; plus encore, ce sont les paroles les plus difficiles de l’Évangile. Tout notre être, tout ce qui est nous, se cabre devant de telles paroles.
Toutefois, Jésus poursuit en disant : « Celui qui veut sauver sa vie la perdra, mais qui perd sa vie à cause de moi la gardera » (Mt 16, 25). Arrêtons-nous sur cet « à cause de moi » : là se trouve toute la prétention de Jésus, la conscience qu’il avait de lui-même et la requête qu’il nous adresse. Il est au centre de tout, Il est le Fils de Dieu qui ne fait qu’un avec le Père (cf. Jn 10, 30), Il est notre unique Sauveur (cf. Ac 4, 12).
Effectivement, ce qui semblait au début n’être qu’une malchance ou un malheur se révèle ensuite, fréquemment, être une porte qui s’est ouverte dans notre vie et qui nous a procuré un plus grand bien. Mais il n’en est pas toujours ainsi : tant de fois, en ce monde, les malheurs demeurent des pertes douloureuses. Ici, une nouvelle fois, Jésus a quelque chose à nous dire. Mieux, il lui est arrivé quelque chose : après la croix, il est ressuscité des morts, et il est ressuscité comme premier-né d’une multitude de frères (cf. Rm 8, 29 ; 1 Co 15, 20). Oui, sa croix ne peut être séparée de sa résurrection. C’est seulement en croyant à la résurrection que nous pouvons parcourir de façon sensée le chemin de la croix.
Il s'est élevé devant lui comme un frêle arbrisseau; comme un rejeton gui sort d'une terre desséchée; il n'avait ni forme ni beauté pour attirer nos regards, ni apparence pour exciter notre amour. 3 Il était méprise et abandonné des hommes, homme de douleurs et familier de la souffrance, comme un objet devant lequel on se voile la face; en butte au mépris, nous n'en faisions aucun cas.
(Isaïe 53, 2 - 3)
MÉDITATION
Quand Véronique a essuyé le visage de Jésus avec un linge, ce visage ne devait certes pas être attirant : c’était un visage défiguré. Mais ce visage ne pouvait laisser indifférent ; ce visage troublait. Il pouvait susciter dérision et mépris, mais aussi compassion et même amour, volonté de venir en aide. Véronique symbolise ces sentiments.
Même s’il est défiguré, le visage de Jésus demeure cependant toujours le visage du Fils de Dieu. C’est un visage défiguré par nous, par l’accumulation énorme de la méchanceté humaine. Mais il est aussi un visage défiguré pour nous, qui exprime l’amour et le don que Jésus fait de lui-même, et qui est un reflet de la miséricorde infinie du Père.
Dans le visage souffrant de Jésus, nous voyons, en outre, une autre accumulation gigantesque, celle des souffrances humaines. C’est ainsi que le geste de pitié de Véronique devient pour nous une provocation, une sollicitation pressante : il devient l’appel, doux mais impérieux, à ne pas nous détourner, à regarder nous aussi ceux qui souffrent, proches et lointains. Et non seulement regarder, mais venir en aide. Le Chemin de Croix de ce soir n’aura pas été parcouru en vain s’il nous porte à des gestes concrets d’amour et de solidarité effective.
Et mes ennemis profèrent contre moi des malédictions: " Quand mourra-t-il? Quand périra son nom? " 7 Si quelqu'un vient me visiter, il ne profère que mensonges; son coeur recueille l'iniquité; quand il s'en va, il parle au dehors. 8 Tous mes ennemis chuchotent ensemble contre moi, contre moi ils méditent le malheur. 9 " Un mal irrémédiable, disent-ils, a fondu sur lui; le voilà couché, il ne se relèvera plus!" 10 Même l'homme qui était mon ami, qui avait ma confiance et qui mangeait mon pain, lève le talon contre moi.
(Psaumes 41, 6 - 10)
MÉDITATION
Jésus tombe de nouveau sous la croix. Bien sûr, il était épuisé physiquement, mais son cœur était aussi blessé à mort. Pesait sur lui, le refus de ceux qui, depuis le début, s’étaient opposés ostensiblement à sa mission. Pesait sur lui le refus que le peuple qui semblait plein d’admiration et d’enthousiasme en sa faveur lui avait, finalement, opposé. C’est pourquoi, contemplant la cité sainte qu’il aimait tant, Jésus s’était exclamé : « Jérusalem, Jérusalem, …, combien de fois j’ai voulu rassembler tes enfants comme la poule rassemble ses poussins, et vous n’avez pas voulu » (Mt 23, 37). Pesaient terriblement sur lui la trahison de Judas, l’abandon des disciples au moment de l’épreuve suprême ; pesait sur lui d’une façon particulière le triple reniement de Pierre.
Nous savons bien que pesait sur lui la masse innombrable de nos péchés, des fautes qui, à travers les millénaires, jalonnent l’histoire humaine.
Nous demandons donc à Dieu, avec humilité mais aussi avec confiance : Père riche en miséricorde, aide-nous à ne pas rendre encore plus pesante la croix de Jésus. En effet, comme l’a écrit Jean-Paul II dont nous célébrons ce soir le cinquième anniversaire de la mort : « La limite imposée au mal, dont l’homme est le fauteur et la victime, c’est en définitive la divine miséricorde » (Mémoire et Identité, p.70).
27 Or, il était suivi d'une grande masse du peuple et de femmes qui se frappaient la poitrine et se lamentaient sur lui. 28 Se tournant vers elles, Jésus dit: " Filles de Jérusalem, ne pleurez pas sur moi, mais pleurez sur vous-mêmes et sur vos enfants, 29 car voici venir des jours où l'on dira: Heureuses les stériles, et les entrailles qui n'ont point enfanté et les mamelles qui n'ont point allaité!
31 Car, si l'on traite ainsi le bois vert, qu'en sera-t-il du sec? " (Evangile selon saint Luc 23, 27 – 29. 31)
MÉDITATION
C’est donc Jésus qui a compassion des femmes de Jérusalem et de nous tous. Alors même qu’il porte la croix, Jésus demeure l’homme qui a compassion des foules (cf. Mc 8, 2), qui fond en larmes devant la tombe de Lazare (cf. Jn 11, 35), qui proclame bienheureux ceux qui pleurent, parce qu’ils seront consolés (cf. Mt 5, 4).
C’est ainsi que Jésus se révèle être le seul à connaître vraiment le cœur du Père et à pouvoir nous le faire connaître : « Personne ne connaît le Père, sinon le Fils, et celui à qui le Fils veut le révéler » (Mt 11, 27).
Depuis les temps les plus anciens, l’humanité s’est interrogée, souvent avec angoisse, pour savoir quelle est véritablement l’attitude de Dieu à notre égard : une attitude de sollicitude providentielle ou au contraire de souveraine indifférence, ou bien encore de dédain et de mépris ? À une question de ce genre, nous ne pouvons pas donner une réponse certaine avec les seules ressources de notre intelligence, de notre expérience et encore moins de notre cœur.
C’est pourquoi Jésus – sa vie et sa parole, sa croix et sa résurrection – est la réalité de loin la plus importante de toute l’aventure humaine, la lumière qui éclaire notre destin.
De la deuxième lecture de saint Paul apôtre aux Corinthiens 5, 19-21
MÉDITATION
Voici le motif le plus profond des chutes répétées de Jésus : non seulement les souffrances physiques, non seulement les trahisons humaines, mais la volonté du Père. Cette volonté mystérieuse et humainement incompréhensible, mais infiniment bonne et généreuse, par laquelle Jésus s’est fait « péché pour nous », par laquelle retombent sur lui toutes les fautes de l’humanité et s’accomplit ce mystérieux échange qui nous rend, à nous pécheurs, la « justice de Dieu ».
Tandis que nous cherchons à nous identifier à Jésus qui chemine et tombe sous le poids de la croix, il est bien juste que nous éprouvions en nous des sentiments de repentir et de douleur. Mais la gratitude qui envahit notre âme doit être encore plus forte.
Oui, Seigneur, tu nous as rachetés, tu nous as libérés, par ta croix tu nous as rendus justes devant Dieu. Mieux encore, tu nous as unis intimement à toi au point de faire aussi de nous en toi, les enfants de Dieu, ses familiers et ses amis. Merci, Seigneur, fais que la gratitude envers toi soit la note dominante de notre existence.
23 Quand les soldats eurent crucifié Jésus, ils prirent ses habits ; ils en firent quatre parts, une pour chacun. Restait la tunique ; c'était une tunique sans couture, tissée tout d'une pièce de haut en bas.
24 Alors ils se dirent entre eux : « Ne la déchirons pas, tirons au sort celui qui l'aura. » Ainsi s'accomplissait la parole de l'Écriture : Ils se sont partagé mes habits ; ils ont tiré au sort mon vêtement. C'est bien ce que firent les soldats.
(Evangile selon Evangile selon saint Jean 19, 23 - 24)
MÉDITATION
Jésus est dépouillé de ses vêtements : nous arrivons au dernier acte de ce drame, qui a débuté avec l’arrestation au jardin des oliviers, où Jésus est dépouillé de sa dignité d’homme, avant même de l’être de celle de Fils de Dieu.
Ainsi donc, Jésus est présenté nu au regard des gens de Jérusalem et au regard de l’humanité entière. Plus profondément, il est juste qu’il en soit ainsi : il s’est en effet complètement dépouillé de lui-même, afin de se sacrifier pour nous. C’est pourquoi le geste de le dépouiller de ses vêtements est également l’accomplissement d’une parole de la Sainte Écriture.
En regardant Jésus nu sur la croix, nous percevons en nous-mêmes un appel pressant : regarder franchement en nous-mêmes; nous mettre à nu spirituellement à nos propres yeux, mais avant tout devant Dieu, et également devant nos frères en humanité. Nous dépouiller de la prétention d’apparaître meilleurs que ce que nous sommes, pour chercher au contraire à être sincères et transparents.
Le comportement qui, peut-être plus qu’aucun autre, provoquait l’indignation de Jésus était l’hypocrisie. Combien de fois a-t-il dit à ses disciples : ne faites pas « comme ceux qui se donnent en spectacle » (Mt 6, 2.5.16), ou à ceux qui contestaient ses bonnes actions : « Malheureux êtes-vous, hypocrites » (Mt 23, 13.15.23.25.27.29).
Seigneur Jésus, toi qui es nu sur la croix, aide-moi à être nu moi aussi devant toi.
25. C'était la troisième heure quand ils Le crucifièrent.
26. Et l'inscription qui indiquait la cause de Sa condamnation portait: Le Roi des Juifs.
27. Ils crucifièrent avec Lui deux voleurs, l'un à Sa droite, et l'autre à Sa gauche.
(Evangile selon Evangile saint Marc 15, 25 - 27)
MÉDITATION
Jésus est cloué sur la croix. Une torture effroyable. Et tandis qu’il est suspendu à la croix, nombreux sont ceux qui se moquent de lui et aussi qui le provoquent : « Il en a sauvé d’autres, et il ne peut pas se sauver lui-même ! … Il a mis sa confiance en Dieu ; que Dieu le délivre maintenant s’il l’aime ! Car il a dit : « Je suis le Fils de Dieu ! » (Mt 27, 42-43). Ainsi est tournée en dérision non seulement sa personne, mais aussi sa mission de salut, cette mission que Jésus précisément sur la croix était en train de porter à son accomplissement.
Mais, en son cœur, Jésus connaît une souffrance incomparablement plus grande, qui lui fait pousser un cri : « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? » (Mc 15, 34). Il s’agit certes des premières paroles d’un Psaume, qui se conclut par la réaffirmation de la pleine confiance en Dieu. Toutefois, ce sont des mots à prendre totalement au sérieux, qui expriment l’épreuve la plus grande à laquelle Jésus ait été soumis.
Combien de fois, face à une épreuve, nous pensons être oubliés ou abandonnés de Dieu. Et même, nous sommes tentés d’en conclure que Dieu n’existe pas.
Le Fils de Dieu, qui a bu jusqu’à la lie son calice amer et qui est ensuite ressuscité des morts, nous dit au contraire, par toute sa personne, par sa vie et sa mort, que nous devons faire confiance à Dieu. En lui, nous pouvons croire.
28. Après cela, Jésus, sachant que tout était accompli, afin que l'Ecriture fût accomplie, dit: J'ai soif.
29. Il y avait là un vase plein de vinaigre. Les soldats en remplirent une éponge, et, la fixant à un rameau d'hysope, l'approchèrent de Sa bouche.
30. Quand Jésus eut prit le vinaigre, Il dit: Tout est accompli. Et inclinant la tête, Il rendit l'esprit.
(Evangile selon saint Jean 19, 28 - 30)
MÉDITATION
Quand la mort survient après une maladie douloureuse, on dit souvent avec soulagement : « Il a fini de souffrir ». En un certain sens, ces paroles valent aussi pour Jésus. Mais ce sont des paroles trop courtes et superficielles, face à la mort de quiconque et bien plus encore face à la mort de cet homme qui est le Fils de Dieu.
De fait, quand Jésus meurt, le voile du Temple de Jérusalem se déchire en deux et d’autres signes surviennent, qui font que le centurion romain qui montait la garde près la croix s’exclame : « Vraiment, celui-ci était le Fils de Dieu ! » (cf. Mt 27, 51-54).
En réalité, rien n’est aussi obscur et mystérieux que la mort du Fils de Dieu, qui, uni à Dieu le Père, est la source et la plénitude de la vie. Mais rien n’est aussi lumineux, parce que là resplendit la gloire de Dieu, la gloire de l’Amour tout puissant et miséricordieux.
Devant la mort de Jésus, notre réponse est le silence de l’adoration. Nous nous confions ainsi à lui, nous nous mettons entre ses mains, en lui demandant que rien, dans notre vie comme dans notre mort, ne puisse jamais nous séparer de lui (cf. Rm 8, 38-39).
1. Trois jours plus tard, il y avait un mariage à Cana en Galilée. La mère de Jésus était là.
2. Jésus aussi avait été invité au repas de noces avec ses disciples.
3. Or, on manqua de vin ; la mère de Jésus lui dit : « Ils n'ont pas de vin. »
4. Jésus lui répond : « Femme, que me veux-tu ? Mon heure n'est pas encore venue. »
5. Sa mère dit aux serviteurs : « Faites tout ce qu'il vous dira. »
(Evangile selon saint Jean 2, 1 - 5)
MÉDITATION
À présent, l’heure de Jésus est accomplie et Jésus est descendu de la croix. Et voici pour l’accueillir, les bras de sa Mère. Après avoir goûté jusqu’au bout la solitude de la mort, aussitôt Jésus retrouve – à travers son corps inanimé – le plus fort et le plus doux de ses liens humains, la tendresse chaleureuse de sa Mère. Les plus grands artistes, nous pensons à la Pietà de Michel-Ange, ont su percevoir et exprimer la profondeur et la force indestructible de ces liens.
En rappelant que Marie, au pied de la croix, est devenue aussi la mère de chacun d’entre nous, nous lui demandons de mettre en notre cœur les sentiments qui l’unissait à Jésus. Pour être véritablement chrétien, en effet, pour pouvoir vraiment suivre Jésus, il faut être lié à lui avec tout ce que nous sommes : notre esprit, notre volonté, notre cœur, nos petits et nos grands choix quotidiens.
Ainsi, seulement, Dieu pourra être au centre de notre vie, ne pas être réduit à une présence consolante qui devrait être toujours disponible, mais sans interférer avec les intérêts concrets sur la base desquels nous agissons.
57. Le soir venu, arriva un homme riche, originaire d'Arimathie, qui s'appelait Joseph, et qui était devenu lui aussi disciple de Jésus.
58. Il alla trouver Pilate pour demander le corps de Jésus. Alors Pilate ordonna de le lui remettre.
59. Prenant le corps, Joseph l'enveloppa dans un linceul neuf,
60. et le déposa dans le tombeau qu'il venait de se faire tailler dans le roc. Puis il roula une grande pierre à l'entrée du tombeau et s'en alla.
(Evangile selon saint Matthieu 27, 57 - 60)
MÉDITATION
Avec la pierre qui ferme l’entrée du sépulcre, tout semble être vraiment terminé. Mais l’Auteur de la vie pouvait-il rester prisonnier de la mort ? C’est pourquoi le tombeau de Jésus, depuis lors et jusqu’à aujourd’hui, n’est pas seulement devenu l’objet de la plus émouvante dévotion, mais il est aussi à l’origine de la plus profonde division des intelligences et des cœurs : là se séparent les routes entre ceux qui croient au Christ et ceux qui ne croient pas en lui, même si par ailleurs ils le considèrent comme un homme merveilleux.
Ce tombeau s’est bien vite retrouvé vide et jamais on n’a pu trouver une explication convaincante au fait qu’il soit resté vide, si ce n’est celle qu’ont donnée les témoins de Jésus ressuscité des morts, de Marie-Madeleine à Pierre, en passant par les autres apôtres.
Devant le tombeau de Jésus, nous demeurons en prière, demandant à Dieu les yeux de la foi qui nous permettent de nous unir aux témoins de sa résurrection. Ainsi, le chemin de la croix devient également, pour nous, source de vie.